Prix annuel destiné à un jeune chercheur ou développeur doté de 2500 €
MARCEL LONCIN
Marcel LONCIN (1920 – 1994), d’origine belge, a d’abord fait des études d’ingénieur chimiste à Charleroi (1) les a poursuivies par une année à l’Institut des fermentations de Bruxelles, ce qui a déterminé sa vocation vers les industries alimentaires.
A sa sortie en 1941, il entreprend une double carrière, un choix qui restera sa marque tout au long de sa vie professionnelle : à la fois assistant à l’Institut et directeur technique d’une brasserie puis d’une laiterie. Il présente ainsi des communications sur la laiterie à des congrès, puis tourne son activité de recherche vers les corps gras sous forme d’une thèse sur l’altération de l’huile de palme qu’il présente à Paris en 1953.
Parallèlement, Marcel Loncin prend connaissance de la notion nord-américaine de « Chemical Engineering », donc de Génie Chimique, consistant à définir des « opérations unitaires » comme la distillation ou le séchage, reposant sur des transferts de matière, de chaleur ou de quantités de mouvement, applicables à toutes sortes de produits de la chimie industrielle (l’ouvrage fondateur de Walter, Lewis et Mac Adams date de 1923). Sa connaissance de l’industrie l’amène à penser que cette idée est applicable aux industries alimentaires. Il concrétise cette idée dans un traité que, pour raisons commerciales m’a-t-il confié bien plus tard, l’éditeur n’a pas souhaité appeler « Les opérations unitaires du génie alimentaire » ou quelque chose de ce genre, mais « Les opérations unitaires du génie chimique » (1961) (2) !
A cette même époque l’ENIA/ENSIA entreprenait une démarche dans le même sens sous l’impulsion du professeur de physique Gabriel Trotel qui avait pendant sa captivité en Allemagne, curieuse conséquence de la guerre ! traduit le livre du professeur allemand Kirschbaum sur la distillation. C’est ainsi qu’avec l’appui d’André Bonastre, Directeur de l’école depuis 1950, G. Trotel donne à partir de 1952 un cours de distillation en tant qu’opération unitaire qu’il associe ensuite à l’extraction sur la base des « étages théoriques ». J’ai reçu moi-même vers 1956 cet enseignement de « Génie industriel » et cela a influencé la suite de ma vie professionnelle puisqu’après ma scolarité à l’ENSIA, je suis allé faire une année de génie chimique aux USA.
Revenons à Loncin, qui rencontre Bonastre à Paris en 56 ou 57. Les premiers cours de Loncin ont lieu en juin 62 à Massy. Par la suite ces cours se poursuivront et, en outre, seront organisées de nombreuses semaines de recyclage d’ingénieurs des industries alimentaires dans des hôtels hors de Paris avec la participation d’autres jeunes enseignants, notamment Bernard Guérin.
De mon côté, j’ai contribué à consolider la position à Massy du « Génie industriel alimentaire » en étant nommé chef de travaux à mon retour du Service militaire au moment des premiers cours de Loncin en 62, ce qui a permis de créer un labo de recherche dans cette discipline et de nouer des collaborations internationales.
Mais M. Loncin, qui poursuivait ses interventions de consultant dans l’industrie, n’arrêtait pas non plus sa carrière universitaire internationale puiqu’en 1972, il fut nommé professeur responsable de l’Institut für Lebensmittelverfahrenstechnik (Institut de technique de procédés alimentaires) de l’Université de Karlsruhe, Allemagne, un poste prestigieux qui lui donnait un laboratoire de recherche.
En 1976, il publie « Génie industriel alimentaire. Aspects fondamentaux » (3) et en 79, avec son disciple américain Merson « Food Engineering. Principles and selected applications » (4).
Retraité, mais toujours actif en entreprise, il meurt brutalement en Dordogne en 1994.
Outre son œuvre de pionnier scientifique et pédagogique, restent de lui les deux prix qu’il a , fondés, ce qui signifie qu’il a déposé une somme suffisante dans une banque pour que ses revenus annuels puissent servir les prix sans entamer le capital. Il s’agit pour la France du « Prix Marcel Loncin » confié à Agoral repris ensuite par l’ACIA et pour les USA du Prix de l’Institute of Food Technologists.
J.J. Bimbenet (Professeur Emérite de l’ENSIA)
(1) Outre mes souvenirs personnels, j’ai emprunté pas mal de faits biographiques sur M. Loncin à P. Vigreux « Des aliments en quête d’acteurs – L’ENIA – 1880-2014 », Classiques Garnier, 2021.
(2) Loncin M., Les opérations unitaires du génie chimique, Paris, Dunod, 1961.
(3) Loncin M.,Génie industriel alimentaire. Aspects fondamentaux, Masson, Paris, 1976.
(4) Loncin M. & Merson R.L., Food Engineering. Principles and selected applications, Academic Press, New York, 1979.